Bonjour à toutes et à tous,
Je sais pas vous, mais quand j’arrive dans une ville que je ne connais pas, j’aime bien connaître le démonyme, c’est-à-dire le nom des habitants de la ville. De ce fait quand je suis arrivée à Cahors je me suis demandée comment s’appelaient les habitants. « Les cahorsins » et « les cahorsiennes » m’est venu tout de suite, sauf ce que n’est pas du tout le cas. Le démonyme (nom des habitants d’une ville) de Cahors est : les cadurciens et cadurciennes. Bien que cela me surpris, car cela ne correspondait pas vraiment au nom de la ville, je me suis habituée à cette dénomination. Remarquez, dans mon ancienne ville, Pia, les habitants sont les pianencques (au masculin comme au féminin).
Dans ma logique : Cahors+siens ou Cahors+siennes
Cependant, cette question m’est toujours restée dans un coin de la tête. Et au cours de mes recherches à la bibliothèque patrimoniale de Cahors, j’ai pu enfin répondre à cette question : pourquoi les cadurciens et cadurciennes ? Et bien figurez-vous que c’est à cause du Moyen-Âge et de la mafia que les habitants de Cahors ont changé de démonyme. Oui oui, vous avez bien lu, la Ma-fia !! Allez, venez que je vous explique…
Pour contextualiser un peu mes découvertes, je vais faire une petite digression, sur les circonstances de cette découverte. Alors que perdue dans les rayonnages de la Bibliothèque Patrimoniale de Cahors, je cherchais la perle rare, je suis tombée sur un ouvrage qui aurait pu ne pas m’intéresser. Son titre est : Annuaire du Lot, 1835. J’avoue qu’éplucher les attributions de revenus des arrondissements de Cahors ne m’attirait pas vraiment, mais en feuilletant rapidement (car je laisse toujours une chance aux livres), j’ai trouvé sept petites pages qui se cachaient parmi des tableaux de comptabilité. J’avoue avoir été surprise du titre de ces quelques pages : Dissertation sur les Usuriers nommés Cahursins ou Caorsins, sur leur origine et leur établissement à Cahors, dans le Moyen-Age, écrit par M. le baron Chaudruc de Crazannes et publié en 1835.
Juste un mot ou deux sur l’auteur : c’est un auteur français né en 1782 et décédé en 1862. Féru d’archéologie, il a beaucoup écrit sur le Lot et le Midi-Pyrénnées avant de terminer sa carrière en tant que préfet à Figeac, Lodève et Castelsarrasin, où il s’est éteint.
Cet ouvrage m’a beaucoup intriguée car c’est le nom que j’aurais donné aux habitants de Cahors, alors qui sont-ils, ces cahursins ?
Tout d’abord pour contextualiser les choses, il faut que je vous parle du statu de marchand au Moyen-Âge. À partir du XIe siècle, les invasions barbares cessent progressivement ce qui permet un « redémarrage économique » avec des voies de commerce (terrestre ou maritime) qui sont de plus en plus sûres. Le commerce s’ouvre à de nouveaux horizons et de nouveau métiers se créent. Au tout début le marchant est itinérant, il voyage avec sa marchandise, puis il se sédentarise avec les comptoirs marchands (situés principalement dans le nord de l’Europe et sur la Méditerranée.)
Avec la sédentarité des marchands naissent de nouvelles problématiques : le besoin de prêt. Pour faire venir de la marchandise (disons d’Italie) pour la vendre (disons aux Pays-Bas), le marchand a besoin d’avancer le prix de la marchandise jusqu’au moment où il va la revendre (et éventuellement faire des bénéfices.). Pour cela il fallait faire appel à un prêteur : une personne, le prêteur donne un financement au marchand. Ce dernier promet de rendre la totalité de la somme et le prêteur se verra offrir un pourcentage sur le bénéfices que le marchand aura fait. Ainsi sont nés les intérêts. Certains gros marchands virent là une opportunité d’avancement en devenant prêteur pour d’autres marchands. C’est comme cela qu’ils devinrent marchands-banquiers ou plus précisément des courtiers.
Cependant, comme tout n’est jamais très rose en ce bas monde, il fallait bien que quelque chose ne passe pas. Celle pour qui ça ne passe pas c’est l’Église avec un grand E (sinon on parle de l’édifice). Pourquoi est-ce que les marchands-banquiers dérangent l’Église ? Quel est le lien entre les marchands-banquiers et les cahorsins ? Vous le saurez en lisant mon prochain article. Vous allez voir c’est pas si drastique que cela…
Historiquement vôtre,
Lauriane